Utilisation de l’ADPIE dans le processus de soins infirmiers

Écrit par John C.

Introduction

L’acronyme  » ADPIE  » – qui signifie évaluation, diagnostic, planification, mise en œuvre et évaluation – est utilisé dans le domaine des soins infirmiers pour aider à guider le processus approprié de fourniture de traitements aux patients (Bernard, 2018). Ce processus peut être utilisé dans des environnements de santé physique ou mentale, et suit le même processus quelle que soit la branche de la médecine dans laquelle les cliniciens travaillent (Ibid.). Cet essai présentera Jerry, un patient présentant de possibles problèmes d’alcool, qui est un homme de 68 ans dont la consommation d’alcool est devenue préoccupante pour ses amis et sa famille, et dont on dit que la mémoire se détériore rapidement. Il convient de noter ici que, conformément au code du Nursing and Midwifery Council (NMC, 2015),  » Jerry  » est un pseudonyme pour préserver la confidentialité du patient, et qu’aucune autre information personnellement identifiable ne sera utilisée dans cet essai. Afin de démontrer le processus ADPIE, chaque étape sera décrite ci-dessous ; les décisions et les actions seront soutenues à la fois par des directives cliniques et par des preuves évaluées par des pairs si cela est pertinent.

Le processus ADPIE

La première étape, l’évaluation, est une phase cruciale du processus ADPIE (Bernard, 2018). L’évaluation des problèmes potentiels de Jerry avec l’alcool consiste en une approche en deux étapes. Tout d’abord, une conversation aura lieu entre l’infirmière et Jerry (et sa femme, si elle est présente). L’infirmière utilisera une approche d’entretien motivationnel et cherchera à connaître son attitude vis-à-vis de la consommation d’alcool et ses croyances à ce sujet. Elle fournira à l’infirmière une vue d’ensemble du niveau de compréhension de Jerry et de son degré actuel de motivation pour changer les choses dans ce domaine (Kleban, 2009). L’utilisation de l’entretien motivationnel permet non seulement d’obtenir ces informations, mais aussi d’adopter une approche collaborative des soins, ce qui favorise l’engagement et l’adhésion au traitement (O’Neill et Nicholson-Cole, 2009). La deuxième phase du processus d’évaluation voit l’introduction de la mesure AUDIT pour dépister objectivement le mésusage de l’alcool et/ou la dépendance (Saunders et al., 1993). Cette mesure est recommandée par le NICE comme un moyen peu coûteux et très sensible de dépister et d’identifier les troubles liés à l’abus d’alcool (NICE, 2011). Il s’agit d’un processus relativement rapide, qui permet d’engager une conversation de soutien supplémentaire, centrée sur la personne. Le score de Jerry à l’AUDIT est de 21 points, ce qui sera discuté ci-dessous. En ce qui concerne les problèmes potentiels de mémoire dont Jerry fait preuve, ils peuvent être évalués au cours de la même conversation que celle décrite ci-dessus, et les problèmes peuvent être explorés dans un esprit de collaboration et de soutien. Au début, Jerry semblait réticent à parler de ses pertes de mémoire, mais l’utilisation de l’approche de l’entretien motivationnel, qui est particulièrement efficace pour contourner les résistances (Kleban, 2009), lui a permis de se sentir à l’aise pour en parler. Il a identifié des occasions de perte complète de mémoire et a accepté de passer le mini examen de l’état mental (MMSE : McDowell et al., 1997). Il s’agit d’un outil recommandé pour le dépistage des patients considérés comme étant à risque de développer une démence (NICE, 2016) ; Jerry a obtenu un score de 24 lors de son évaluation.

L’étape suivante est le diagnostic, qui est informé par un processus d’évaluation détaillé tel que décrit ci-dessus. Les outils objectifs utilisés – l’AUDIT et le MMSE – permettent de mener ce processus en conjonction avec des mesures cliniquement significatives (NICE, 2011 ; 2016). L’utilisation d’un entretien clinique de soutien tout au long du processus d’évaluation a permis d’évaluer et de traiter de nombreux indices sur les problèmes de Jerry afin d’établir un diagnostic. En discutant avec Jerry, il est apparu clairement qu’une grande partie de sa routine tourne autour de la consommation d’alcool, et que si l’alcool n’est pas à portée de main pour une raison quelconque, il devient rapidement violent et angoissé. Son score de 21 à la mesure AUDIT suggère que sa consommation d’alcool est à la fois dangereuse et nocive (Saunders et al., 1993). À la suite de ces informations, Jerry pourrait être diagnostiqué comme étant dépendant de l’alcool. En ce qui concerne la mémoire de Jerry, l’entretien clinique a révélé une fréquence accrue de trous de mémoire, ce qui, combiné au score MMSE de 24, indique que Jerry souffre actuellement d’une légère dépression (McDowell et al., 1997). En raison de l’absence prolongée et aiguë d’alcool chez Jerry, le diagnostic initial lié à cette démence est probablement le syndrome de Korsakoff. Bien qu’il n’y ait pas de test validé avec lequel ce diagnostic peut être confirmé, les facteurs de la présentation de Jerry appuieraient la formulation de ce jugement clinique (Alzhemiers, Association, 2016).

Après le diagnostic viennent les phases de planification, de mise en œuvre puis d’évaluation. Aux fins de la continuité du problème, ce triumvirat de phases sera d’abord discuté en relation avec les problèmes de Jerry avec l’alcool, puis ensuite avec sa démence.

En ce qui concerne la dépendance à l’alcool de Jerry, il était réticent à cesser complètement sa consommation d’alcool. Bien que les directives du NICE (2011) identifient cela comme un objectif clé du traitement, elles indiquent également qu’une première étape importante consiste à réduire la consommation d’alcool de manière structurée. Nous envisageons donc avec Jerry de réduire sa consommation à environ 4 unités d’alcool par jour, tout en accédant à des services spécialisés dans l’alcool pour traiter le problème à long terme. Dans l’intervalle, nous prévoyons également qu’il appelle une ligne d’assistance spécialisée s’il ressent le besoin d’être soutenu pendant qu’il réduit sa consommation. Pour mettre en œuvre ce plan, il est important que la motivation de Jerry soit exploitée avant qu’elle ne diminue, comme cela peut souvent être le cas (Robinson et al., 2016). Cela sera facilité par l’objectif de Jerry de réduire sa consommation plutôt que de s’abstenir, car cela représente un objectif plus gérable et plus réaliste, ce qui, à court terme, est susceptible de stimuler la motivation et d’augmenter les niveaux d’auto-efficacité : deux facteurs importants dans le processus de rétablissement (Maisto et al., 2015). Il est également important, afin de maintenir les progrès, de mettre en œuvre un aiguillage et un traitement rapides par des services spécialisés. Pour évaluer ces objectifs, une date de suivi dans quatre semaines sera fixée. La mesure AUDIT sera à nouveau utilisée pour mesurer la consommation d’alcool de Jerry par rapport aux objectifs fixés. Il est prévu qu’à la suite d’une orientation urgente vers des services spécialisés, Jerry aura également eu une première saison avec des intervenants en alcoologie dans ce laps de temps. Le rendez-vous de suivi permettra également de procéder à d’autres évaluations des risques quant à l’état de Jerry.

Le prochain domaine de considération est la planification, la mise en œuvre et l’évaluation en ce qui concerne le diagnostic possible du syndrome de Korsakoff de Jerry. Son score MMSE suggère que, bien que les symptômes soient actuellement classés comme légers, ils vont dégénérer et s’aggraver au fil du temps (Rensen et al., 2017). Bien que Jerry ait trouvé cela difficile à évoquer, avec le soutien de sa femme, il a noté l’importance de pouvoir mettre en place des structures de soutien pour cette pathologie. En conséquence, nous avons prévu d’aborder deux objectifs, le premier sera de développer un système pour soutenir un meilleur auto-soin, et le second était d’accéder à un traitement spécialisé dès que possible. Pour mettre en place ce système, Jerry et sa femme vont identifier les domaines d’auto-soins et les activités de la vie quotidienne qui sont actuellement oubliés par Jerry. Une liste de contrôle peut alors être établie et accrochée dans un endroit bien en vue de la maison, par exemple sur le réfrigérateur. Ces aides-mémoire sont un moyen simple et efficace de gérer la situation et de rester engagé dans le processus de traitement (Bourgeois, 2014) en attendant un rendez-vous avec un spécialiste. Cela sera évalué lors du même rendez-vous de suivi de 4 semaines pris en relation avec les problèmes de Jerry avec l’alcool, à ce moment-là, l’utilisation des aides-mémoire sera examinée et tout changement nécessaire à leur utilisation pourra être identifié et mis en œuvre.

Résumé et conclusion

La description ci-dessus des premiers soins de Jerry a fourni un exemple de la façon dont le processus ADPIE peut être utilisé pour aborder systématiquement la fourniture de traitement aux patients, même avec des conditions complexes et comorbides comme celles de ce cas. L’ADPIE permet aux infirmières d’utiliser ce système pour travailler méthodiquement sur une série de symptômes et développer des approches pour diagnostiquer, traiter et évaluer les patients d’une manière à la fois fondée sur des preuves et centrée sur la personne (Bernard, 2017). Le processus doit être suivi de manière séquentielle et, comme l’a démontré le cas de Jerry, il peut être appliqué à plusieurs conditions à la fois. En effet, lorsqu’on travaille avec des patients souffrant d’affections de longue durée, qui présentent généralement plusieurs maux ou préoccupations, ce processus peut être un moyen efficace d’éviter les dangers de l’éclipsage du diagnostic (Acharya, Schindler et Heller, 2016). Le processus ADPIE, en d’autres termes, permet aux infirmières d’être sûres qu’aucune pierre n’est négligée lorsqu’elles travaillent avec des patients ayant des besoins de santé complexes, et qu’ils reçoivent en conséquence des soins efficaces et de haute qualité, en liaison avec les directives cliniques nationales. En accordant une attention particulière à la fois aux soins centrés sur la personne et aux soins fondés sur des données probantes, le processus ADPIE peut également être efficace pour engager les patients et leurs familles dans le processus de traitement, ce qui peut être un indicateur significatif de l’efficacité d’un traitement (Eaton, Roberts et Turner, 2015). Il s’agit donc d’une approche qui aide à la fois l’infirmière et le patient et, par conséquent, on devrait envisager de l’utiliser dans toutes les situations où un processus de traitement robuste est nécessaire.

Acharya, K., Schindler, A. et Heller, T., 2016. Vieillissement : Démographie, trajectoires et enjeux du système de santé. In Health care for people with intellectual and developmental disabilities across the lifespan (pp. 1423-1432). Springer, Cham.

Alzheimers Association (2016). Syndrome de Korsakoff. https://www.alz.org/dementia/downloads/topicsheet_korsakoff.pdf (consulté le 12 novembre 2018).

Bernard, C., 2018. Un cadre empirique pour la pratique des soins infirmiers. Empirical Nursing : The Art of Evidence-Based Care, p.231.

Bourgeois, M.S., 2014. Aides à la mémoire et à la communication pour les personnes atteintes de démence. Health Professions Press, Incorporated.

Eaton, S., Roberts, S. et Turner, B., 2015. Délivrer des soins centrés sur la personne dans les affections de longue durée. Bmj, 350, p.h181.

Kleban, M., 2009. L’entretien motivationnel dans les soins de santé : aider les patients à changer de comportement. Psychiatric Services, 60(9), pp.1275-1276.

McDowell, I., Kristjansson, B., Hill, G.B. et Hebert, R., 1997. Dépistage communautaire de la démence : The mini mental state exam (MMSE) and modified mini-mental state exam (3MS) compared. Journal of clinical epidemiology, 50(4), pp.377-383.

Maisto, S.A., Roos, C.R., O’sickey, A.J., Kirouac, M., Connors, G.J., Tonigan, J.S. et Witkiewitz, K., 2015. L’effet indirect de l’alliance thérapeutique et de l’auto-efficacité en matière d’abstinence d’alcool sur la consommation d’alcool et les problèmes liés à l’alcool dans le projet MATCH. Alcoolisme : Clinical and Experimental Research, 39(3), pp.504-513.

NICE, 2011. Troubles liés à l’usage de l’alcool : diagnostic, évaluation et prise en charge de la consommation nocive d’alcool et de la dépendance à l’alcool. https://www.nice.org.uk/guidance/cg115/chapter/1-Guidance#identification-and-assessment (consulté le 11 novembre 2018).

NICE, 2016. Démence : soutenir les personnes atteintes de démence et leurs aidants dans les soins de santé et les soins sociaux. https://www.nice.org.uk/guidance/cg42 (consulté le 11 novembre 2018).

Nursing and Midwifery Council (Grande-Bretagne), 2015. The Code : Normes professionnelles de pratique et de comportement pour les infirmières et les sages-femmes. NMC.

O’Neill, S. et Nicholson-Cole, S., 2009. « Fear Won’t Do It » Promouvoir un engagement positif avec le changement climatique à travers des représentations visuelles et iconiques. Science Communication, 30(3), pp.355-379.

Rensen, Y.C., Kessels, R.P., Migo, E.M., Wester, A.J., Eling, P.A. et Kopelman, M.D., 2017. Mémoires autobiographiques personnelles sémantiques et épisodiques dans le syndrome de Korsakoff : Une comparaison des méthodes d’entretien. Journal of clinical and experimental neuropsychology, 39(6), pp.534-546.

Robinson, N., Kavanagh, D., Connor, J., May, J. et Andrade, J., 2016. Évaluation de la motivation à contrôler la consommation d’alcool : les échelles de fréquence de pensée motivationnelle et de motivation d’état pour le contrôle de l’alcool. Addictive behaviors, 59, pp.1-6.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée.